L’histoire de l’orgue de l’église Sainte-Julienne de Salzinnes commence le 6 juillet 1907, date à laquelle sera conclu et signé le marché passé entre le Curé Cavillot et la Maison Walcker pour la construction d’un orgue neuf. L’instrument comptera 35 registres, disposés sur 2 claviers manuels et pédalier, son prix étant fixé à 16500 Francs or, buffet compris.
Il semblerait que la société Mutin-Cavaillé-Coll ait également proposé un devis, qui ne fut pas retenu. Il prévoyait la construction d’un orgue mécanique de deux claviers manuels et pédalier, nanti d’une vingtaine de jeux.
Détails de la construction: les sommiers seront établis en bois de premier choix d’après le système pneumatique dit "Walcker’sche Kegellade"
Le récital d’inauguration eu lieu le mercredi 6 novembre 1907 à 14h15, et fut donné par Auguste Verrees, lauréat de l’Institut Lemmens (Malines) et organiste titulaire des grandes-orgues de la Cathédrale de Namur. L’église était bondée, et la prestation d’Auguste Verrees recueillit un grand succès.
Cependant, si tous les auditeurs présents ce jour-là étaient d’accord sur la beauté et la somptuosité des différents jeux, tout porte à croire que cet orgue fut incompris dès son installation. En effet, en décembre 1907, la revue « Musica Sacra » publia un article consacré à l’inauguration des nouvelles orgues, où il était question de manque de brillance et de manque de présence du 2ème clavier (appelé Récit dans l’article).
Il va de soi que cet instrument n’était en rien comparable aux Cavaillé-Coll ou aux Van Bever que l’on trouvait à l’époque, dotés, eux, de grands récits symphoniques.
En 1927, la firme Walcker procéda à une première restauration, qui consista en diverses réparations mineures.
En 1944, la firme Dresse (Namur) fut chargée d’effectuer une seconde restauration, de plus importante, qui consista à nettoyer l’instrument, à pratiquer diverses réparations, à remplacer le pédalier et à placer des relais pour électrifier une partie de la transmission. On ignore toutefois l’ampleur de ces travaux.
L’orgue continua à fonctionner sans incident jusque dans les années 1957-58. A ce moment, l’orgue était toujours jouable, mais la traction pneumatique montrant de grands signes de fatigue, il fut décidé de le restaurer en profondeur.
C’est durant cette période qu’il fut demandé au facteur Van de Cauter de faire un rapport sur l’état de l’instrument.
Différents facteurs établirent un devis, et c’est finalement la firme Delmotte qui se verra chargée des travaux en 1962, sous la direction de Charles Hens, choisi comme auteur de projet. Ce dernier était organiste de la Collégiale Ste-Gudule à Bruxelles, et Professeur au Conservatoire Royal de Musique de cette même ville.
Les travaux consistèrent à :
18 jeux de Walcker furent conservés, ainsi que tous les sommiers. Un des sommiers du 1er clavier fut descendu à même la tribune pour devenir le sommier du nouveau clavier de positif. Quant à la tuyauterie originelle, elle fut plus ou moins réharmonisée, dans le but d’apporter plus de lumière et de légèreté à l’ensemble.
On s’en doute, l’instrument allait ainsi se voir défiguré, privé de son identité.
Le dimanche 24 juin 1962 à 20h eu lieu la bénédiction et l’inauguration des orgues transformées et modernisées. Le programme fut le suivant :
L'orgue traversa ainsi les années sans trop de modifications, à l'exception de quelques jeux qui furent soit décalés soit remplacés par le titulaire d'alors.
Dans les années 1990, la situation de l'orgue commençait à devenir préoccupante, on ne comptait plus les cornements et les jeux devenus inutilisables dès que le chauffage à air pulsé fonctionnait. Une nouvelle restauration s'imposait, mais l'avenir de l'instrument semblait compromis. Il a fallu attendre 2003 pour que les choses commencent à bouger. Le nouveau titulaire de l'orgue prenait ses fonctions sur un instrument bien fatigué, dont la peau des membranes comptaient presqu'un siècle, et dont les sommiers étaient recouverts d'une épaisse couche de poussière.
Démarra alors un projet de restauration. Après un examen de l'instrument, il apparaissait que le fonds historique de 1907 était encore en grande partie présent. L'esthétique sonore de l'orgue à ce moment n'étant ni homogène ni réellement convaincante, l'organiste titulaire souhaita un retour à la composition d'origine pour plusieurs raisons: tout d'abord ce genre d'instrument est devenu tout à fait rare, voire unique. En effet, la plupart des instruments contemporains de même facture se trouvaient en Allemagne et connurent les affres des deux guerres mondiales. Ensuite, la tuyauterie d'origine restante était dans un remarquable état de conservation, et on pouvait y découvrir des curiosités, comme le synthematophon, dont il ne reste guère que 5 exemplaires dans le monde.
Plusieurs concerts furent alors donnés, dans un but pédagogique de démystification de l'instrument orgue, des articles paraissent dans la presse, des visites de l'orgue par des classes de primaire s'organisent...
Toutefois, le projet de retour à l'état d'origine dû être revu à la baisse. En effet, plusieurs difficultés, financières, morales, ou purement esthétiques contrariaient les projets du titulaire.
Grâce aux soutien des paroissiens, de certains mécènes et d'une Fondation suisse, des travaux purent être entrepris dès 2008 par la firme Delmotte.
Ainsi, les sommiers deviennent complétement électriques et perdent leur partie pneumatique, de nouveaux jeux sont posés, certains autres sont décalés, dans un souci de revenir à un instrument plus cohérent, avec un réel fond romantique. La console est restaurée, complètement modernisée et dotée d'un combinateur.